
Sonnez trompettes, résonnez tambours, la pasionaria des lettres est de retour ! Télérama nous annonce cette semaine « L'évènement de la rentrée », le nouveau livre de Virginie Despentes. L'évènement, oui, carrément. J'en déduis qu'à Télérama, ils ont déjà lu les 489 autres romans de cette rentrée littéraire 2022 et que le "Despentes" s'impose d'office en haut de la pyramide. Pour ma part, ne l'ayant pas lu, je ne sais pas ce qu'il vaut (et ce n'est pas mon sujet).
Ce que je sais en revanche, et que je n'arrive pas à oublier, à l'opposé d'une certaine presse, c'est ce que l'écrivaine a déclaré après l'attentat contre Charlie Hebdo en 2015 et sa coupable indulgence pour les frères Kouachi : « J’ai été aussi les gars qui entrent avec leurs armes. Ceux qui venaient de s’acheter une kalachnikov au marché noir et avaient décidé, à leur façon, la seule qui leur soit accessible, de mourir debout plutôt que vivre à genoux. J’ai aimé aussi ceux-là qui ont fait lever leurs victimes en leur demandant de décliner leur identité avant de viser au visage. J’ai aimé aussi leur désespoir. (...) Je les ai aimés dans leur maladresse – quand je les ai vus les armes à la main hurler "on a vengé le Prophète" et ne pas trouver le ton juste pour le dire. » (Les Inrocks) Dégueulasse, j'ai beau y réfléchir, je ne trouve toujours pas d'autre mot. Et que dire de sa tribune de soutien à Adèle Haenel en 2020 après que l'actrice ait quitté la cérémonie des César en réponse au sacre de Roman Polanski comme meilleur réalisateur : « Le temps est venu pour les plus riches de faire passer ce beau message : le respect qu'on leur doit s'étendra désormais jusqu'à leurs bites tachées du sang et de la merde des enfants qu'ils violent. » C'est bien connu, c'est même statistique, tous les plus riches, sans exception, se lèvent chaque matin en se demandant quels enfants ils vont bien pouvoir violer. Vous en voulez encore ? La même année, toujours prompte à s'insurger, et à dire n'importe quoi, la voilà dénonçant le « racisme » de la France : « En France nous ne sommes pas racistes mais je ne me souviens pas avoir jamais vu un homme noir ministre. Pourtant j’ai cinquante ans, j’en ai vu, des gouvernements. » Mais elle n'avait pas vu Félix Houphouët-Boigny, Léopold Sédar Senghor Roger Bambuck, Kofi Yamgnane, Laura Flessel, Sibeth Ndiaye... Il n'est pire aveugle que celle qui ne veut pas voir.
D'autres auteurs qu'elle ne se seraient pas relevés d'un tel chapelet d'outrances et d'idioties, ils les traîneraient comme un boulet, on les y ramènerait à chaque nouveau livre, on leur demanderait de se justifier ou d'exprimer des regrets (ce que Virginie Despentes n'a jamais fait). L'auteure de "Baise-moi", elle, est sortie miraculeusement indemne des polémiques nées de ses déclarations. Vous comprenez, ce serait indélicat de l'embêter avec ça, et puis c'est le passé, écoutons plutôt ce qu'elle a d'intéressant à nous dire (tout n'est pas à jeter, soyons juste). Un privilège rare par les temps qui courent. Télérama préfère donc lui offrir les honneurs de sa couverture, nous annoncer rien de moins que « l'évènement de la rentrée », la décrire comme « prête, une nouvelle fois, à renverser la table » (!), louer son « esprit de révolte » et nous donner à lire en exclusivité de nouvelles fulgurances : « Les jeunes féministes m'intéressent énormément (...) Certaines n'hésitent pas à déclarer qu'elles détestent les hommes (...) C'est jouissif et joyeux d'être témoin de ça. » Étonnant, non ? Ne cherchez pas, cela s'appelle "avoir la carte", autrement dit être dans les petits papiers de l'intelligentsia littéraire et médiatique, qui n'aime rien tant que de se créer des frissons en lisant une auteure censément subversive. Finalement, Virginie Despentes, c'est un peu le grand huit de Saint-Germain-des-Prés.
Ch.R.
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